Notes diverses et dérisoires sur "Alcools" d'Apollinaire
NOTES DIVERSES ET DÉRISOIRES
SUR ALCOOLS DE GUILLAUME APOLLINAIRE
La porte de l’hôtel sourit terriblement (cf La Porte)
Il s’agit d’une personnification : les choses ont de ces airs parfois que l’on dirait bien qu’elles vont vous agresser.
Pendez vos têtes aux patères par les tresses (cf Palais)
Ce vers est d’un surréalisme échevelé, têtu ironique, dental. Et le vers suivant est joli comme tout :
Le ciel presque nocturne a des lueurs d’aiguilles
Métaphore du ciel tissé où sur l’étoffe bleue brillent les aiguilles d’on ne sait quel tisserand caché.
Maintenant tu marches dans Paris tout seul parmi la foule
Des troupeaux d’autobus mugissants près de toi roulent (cf Zone)
Les deux vers riment mais n’ont pas la même mesure : 15 syllabes et 13 syllabes.
Le vers s’assouplit ainsi imitant les aléas de la rêverie, de la promenade dans les rues de Paris.
Cependant, le travail du poète donne au second vers un rythme ternaire qui renforce la métaphore autobus/bovidés.
»tout seul parmi la foule » : certes, c’est forcément un solitaire, le rêveur qui superpose aux images des autobus celle de troupeaux de bêtes à cornes.
Encore qu’il y ait fatalement – c’est dans les statistiques, c’est pas contestable -, un nombre x de bêtes à cornes qui prennent quotidiennement le bus.
Ceci dit, solitaire l'Apollinaire, sans doute, mais il ne devait pas être le seul original à arpenter Paname ; rien qu’avec les artistes-peintres, ça devait faire un sacré paquet de « tout seul parmi la foule ».
De plus, plus que probable que, marchant dans les rues de Paris, Apollinaire devait penser à autre chose qu’à la parenté des autobus avec les vaches des prés « vénéneux mais jolis en automne » (cf Les Colchiques).
Patrice Houzeau
Hondeghem contre l'A24
le 2 février 2006