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BLOG LITTERAIRE
17 février 2006

REVE D'IRLANDE

RÊVE D'IRLANDE

J'ai toujours eu une sympathie hors de propos pour l'Irlande.
Hors de propos puisque je n'ai de rapport avec l'Irlande que par mon prénom qui fut aussi celui du Saint qui évangélisa ce peuple que l'on se représente facilement lutteur, batailleur et buveur.
C'est donc fort peu, je vous l'accorde et, n'ayant aucun lien avec l'Irlande et ses vastes étendues venteuses, de quel droit cette sympathie ?
D'aucun tant il est vrai que ce pays que j'affectionne n'existe pas.
Cependant, que James Joyce et Samuel Beckett soient tous deux irlandais et deux des plus fabuleux écrivains que l'on puisse lire, me ravit.
La première page d'Ulysse me fut un tel choc que j'ai aussitôt interrompu ma lecture pour faire trois ou quatre fois le tour de mon bureau en me disant que, jusqu'ici, je n'avais jamais rien lu de tel.
Le fait que Joyce et Beckett aient tous deux quitté l'Irlande sous les quolibets de leurs compatriotes pour gagner la France et s'y installer, et le fait qu'en réparation de cet étrange aveuglement, l'Irlande a décidé depuis un bout de temps déjà d'exempter d'impôt les écrivains professionnels sont pour moi pain béni.
Bien sûr, il y a l'IRA, les attentats, les assassinats politiques, beaucoup de saloperies que je ne puis approuver, mais il y a aussi l'esprit de résistance, la défense d'une identité culturelle et, affectivement, avec une immense mauvaise foi, je me suis senti parfois proche de cette revendication d'une nation catholique à côté de la toute puissante et anglicane Angleterre.
Mauvaise foi qui fait d'ailleurs feu de tout bois : Un Taxi mauve de Michel Déon, les clips vidéos des Cranberries (dont la chanteuse est, dit-on, si traditionnaliste), Sinead O'Connor et son dit-on imprévisible caractère, les militants que la copine à Pinochet, Margaret Thatcher (que Dieu la vomisse !) a laissé crever de faim dans les prisons du royaume, la stupide "affaire des Irlandais de Vincennes" dans laquelle des barbouzes assermentés à la solde des comiques socialistes, qui dans le même temps des glorieuses années Mitterrand prêchaient le civisme et la morale républicaine sur toutes les radios et télés, barbouzes donc, - il y en avait un, on s'en souvient, qui avait les oreilles décollées sous ses cheveux trop courts et l'air parfaitement crétin -,  barbouzes donc qui ont tenté de faire passer de placides ressortissants irlandais de passage dans notre douce France pour de dangereux terroristes.
Je me souviens aussi de cet album d'Hugo Pratt, Les Celtiques, et de cette atmosphère si particulière d'une Irlande à la fois guerrière et magique que suggèrent les géniaux noir-et-blanc du grand Hugo.
Et le dernier voyage à l'étranger du Général De Gaulle.
Et puis, bien sûr, il y a la musique, cette musique traditionnelle irlandaise qui continue sa course de par le monde : dois-je vous l'avouer, difficile de résister à l'émotion en écoutant les Dubliners chanter Molly Malone (surtout après deux whiskyes) ; comment ne pas se sentir fondre le coeur que l'on a tout mou, allez, (surtout après trois whiskyes) en écoutant Moutains of Mourne et n'avez-vous point la guibole qui gigote toute seule à l'écoute de Whiskey in the Jar (surtout après quatre ou cinq verres du dit breuvage) ?
Mais, bien sûr, je ne suis pas dupe, l'Irlande dont je cause est Irlande de chanson, Irlande de video-clip, Irlande de reportages télés plus ou moins complaisants, Irlande de légende littéraire, Irlande de fiction, aussi réelle que peut l'être un fantôme dans un château écossais.
Il est d'ailleurs plus que probable que si les hasards de la vie me conduisaient en Irlande, je ne supporterai pas longtemps le mode de vie irlandais, pas plus que je ne supporterais le mode vie allemand, espagnol, sénégalais ou monténégrin, pas plus que je ne supporte le mode de vie de la plupart de mes compatriotes.
Me sachant casanier et misanthrope, je reste donc dans mon rêve d'Irlande et je sourie un peu à l'idée qu'il y a probablement quelque part, à Dublin, à Belfast ou perdu dans les longues prairies venteuses, une sorte de Patrick O'Houzot qui songe qu'il est bien beau, son rêve de France.
Que Dieu le bénisse.

Note à propos de l'affaire dite "des Irlandais de Vincennes" : bel exemple d'opération Dupont-Dupond (en anglais : "Smith-and-Smith Case") dont je rappelle une fois de plus le principe de base : Donner un ordre stupide à un parfait crétin de manière à mouiller une tierce andouille. Imparable !

Patrice Houzeau
Hondeghem contre l'A24
le 17 février 2006

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Commentaires
O
Et Swift, nom de d'là!!!! LEs instructions aux domestiques!!! Génial ( et l'édition du livre de poche est préfacé par Nimier!!!!!)
O
Joyce et Beckett ne doivent pas nous faire oubier (mais ils ne le font pas!!!!) que le fond de L'Eire effraie! Et de l'Uslster aussi! CAr Bredan Behan n'y va pas avec le dos de la cuiller tandis qu'avant le "oui" de Molly Bloom (Sublime, aussi, les dernières pages d'Ulysse) sévissait "Le baladin du monde occidental",beau titre et carte de visite de John Millington Synge qui écrit comme on s'ameute, et se trouve être également l'auteur de "Deirdre des douleurs", qui, peut-être, signifie quelque chose pour moi... <br /> <br /> On peut aussi lire les superbes promenades de Paddy Fermor... Paddy? Mais c'est aussi du whiskey, ça!!!<br /> <br /> Autre catho cinglée, mais américaine de nationalité, et capable de se foutre elle-même de sa propre catholicité, il y a eu la "papiste des montagnes", la pure cinglée, l'impossible, la frénétique Flannery O'Connor... Flannery!!! En voilà un prénom!!!
C
"Guerrière et magique". Oui c'est comme ça qu'on aime à l'imaginer. On aime l'imaginer cette Irlande en belle rouquine au teint vif courant une lande sauvage...oui, oui. Ecouter sa musique qui donne envie de sautiller avec notre grâce de crapauds français. Pays de légendes s'il en fut.<br /> <br /> Et puis...il y a le reste. Qui n'est pas si joli comme tu le dis. Dolores O'Riordan conspuant l'avortement sur scène par exemple...l'Irlande catho jusqu'à l'os (peut-être l'expression la plus visible de sa résistance?). Les attentats, la violence. Mais pas pire que d'autres nations.<br /> <br /> Tiens sers moi un irish coffee bien serré, Saint Padraig! ;o)<br /> <br /> Amitiés
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