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BLOG LITTERAIRE
17 juin 2012

HERON FOU

HERON FOU

1.
"Où vont les gants d'avril, et les rames d'antan ?
L'âme des hérons fous sanglote sur l'étang."
(Jules Laforgue, Les Complaintes, Complainte de l'ange incurable)

1a.
"Où vont les gants d'avril" :rythme binaire.
"et les rames d'antan" : rythme ternaire.
Le second alexandrin commence par une accentuation ("l'âme"). Le double accent des syllabes 5 et 6 ("-rons fous") souligne l'épithète "fous", la détache comme un coup, comme une percussion.

1b.
assonances : gants - antan - sanglote - étang / où - fous / vont - hérons / rames - âme.
allitérations : v (vont - avril) / r (avril - rames - hérons) / t (antan - sanglote -étang).
C'est qu'ça musique, ce distique.

1c.
"gants d'avril" : je sais pas ce que c'est. On imagine des gants blancs. En avril ne te découvre pas d'un fil, et mets donc des gants, c'est plus élégant. Epoque des mariages, peut-être. Pour les "rames", je sais pas ce que c'est non plus. Car j'ai l'esprit tout circulé d'un tas de trucs et machins, je pense au vers célèbre de la chanson célèbre qui dit : Trois dames s'en vont les ramassant. Mais ça n'a rien à voir. Et puis il y a du temps qui passe. Mesure du temps, les vers. Les poèmes sont des horloges hallucinées. Ils ne voient pas le temps tel qu'il est. Ils essaient de le retenir, de le charmer. C'est Ulysse qui fuit les îles. Le temps, c'est la ruse d'Ulysse. I fait rien qu'à nous rouler dans la farine, et puis hop ! au grand four des ténèbres. Enfin, toujours est-il (expression à ma mère, ça, toujours est-il) que les gants s'en vont, et les rames d'antan, par définition, ne rament plus.

1d.
Pourquoi les hérons seraient-ils plus fous que les autres zoziaux ? Ou alors, c'est que les bestioles sont folles par définition. C'est que nature n'est point raison, et que ce qui n'est pas raison est déraison, et ce qui est déraison est folie. Eh ! j'ai donc mangé le sganarelle que me voilà si raisonneur. En tout cas, le vers est beau. On y entend les étranges cris des longs oiseaux le long des étangs en leurs campagnes humides, là où il y a des lieux et des lieux qui n'en finissent pas de vous perdre l'oeil. Claquements, appels gris fer, on n'est même pas sûr qu'il y a réellement là quelque héron fou ; c'est peut-être le scribe qui rêvasse dans sa chambre en ville, qui rêve que tout est plein d'âme, là-bas, ailleurs, que c'est son Pink Floyd à lui, Jules, ce qu'il entend dans sa tête à fantaisies, à claques de vent, à cingle la pluie. Voilà pourquoi ça musique tant dans le distique. Pour faire rêver.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 17 juin 2012

 

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Commentaires
B
lol.<br /> <br /> <br /> <br /> Tuuuuuuuuuut tututut
P
BEN OUI ! EN TOUT CAS MERCI C'EST TOUJOURS SYMPA DE VOIR DES GENS S'INTERESSER A CE QUE L'ON ECRIT. "BUIDIDAN", c'est un pseudonyme, non ? Est-ce que l'on se connaît ?<br /> <br /> <br /> <br /> Patrice Houzeau<br /> <br /> Hondeghem, le 17 juin 2012
B
la barque du temps :))
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