RIONS UN BRIN

RIONS UN BRIN

"Quand on se retournera sur l'époque actuelle, ce qui frappera, c'est l'hallucinant gâchis de ressources, les montagnes de déchets de toute sorte qui sortent chaque seconde par la porte de derrière de cette usine à gaz."
(Yann Moulier Boutang, La politique peut-elle forcer l'inertie de la situation économique ? in "L'Impossible" n°4, juin 2012, p.29, rien que le titre, on se bidonne déjà ! Après, ce genre de phrase qui enfonce, j'apprécie, et puis "de toute sorte qui sortent", c'est vraiment bon !).

Quand les poules auront des dents - ce dont
On ne peut douter, l'humain pouvant tout ! - on
Se penchera, c'est-à-dire pas nous, mais celui-là qui se
Retournera, afin d'en faire l'analyse, l'historique et la glose,
Sur nos jours étranges, car ce que nous appelons
L'époque n'est pas moins cousue de jours étranges ;
Actuelle, la situation est forcément problématique.
Ce qui fait nos existences, production et consommation, est ce
Qui fait notre souci, pollution récession ; alors, ce qui le
Frappera, le savant du futur, l'expert de notre présent,
C'est cette masse de choses jetées, cet infini de
L'hallucinant jetable partout poubelle partout décharge partout
Gâchis de tout, vu qu'on est
De plus en plus nombreux à produire et consommer, qu'les
Ressources forcément s'épuisent, et que dans
Les paysages qui s'étiolent et s'bétonnent, qu'ça pousse des
Montagnes de trucs et bidules,
De machins et machines,
Déchets de tout ce qu'on nous vend qu'on bouffe,
De tout ce qu'on nous vend qu'on jette, de
Toute cette gaspillerie quoi faire ? Quelle
Sorte de recyclage pourrions-nous adopter
Qui évitera qu'ils
Sortent se répandre dehors, les rebuts de nos vies,
Chaque vie étant une somme de choses mortes, chaque
Seconde étant pleine de choses mortes,
Par les villes et par les champs des choses mortes,
La terre étant vouée elle aussi à la chose morte. La
Porte, un jour, elle claquera sur nos faces enfarinées ;
De la hauteur de tous les cieux, de
Derrière les étoiles et les galaxies,
De la grande béance noire là-bas,
Cette voix tombera qui la condamnera la mondiale
Usine et tous ses usagers
A mourir par le
Gaz vu qu'on a oublié de le fermer avant de se tirer en vacances.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 2 août 2012