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BLOG LITTERAIRE
29 janvier 2013

SOIF

SOIF

"Un jour, avec des yeux vitreux, ma mère me dit : "Lorsque tu seras dans ton lit, que tu entendras les aboiements des chiens dans la campagne, cache-toi dans ta couverture, ne tourne pas en dérision ce qu'ils font : ils ont soif insatiable de l'infini, comme toi, comme moi, comme le reste des humains, à la figure pâle et longue."
(Lautréamont, Les Chants de Maldoror, Chant Premier, Presses-Pocket n°6068, p.33)

Il est des phrases qui sont de petits poèmes. Cette phrase de Maldoror, je la trouve superbe. Avec cette mère "aux yeux vitreux", comme si elle n'était plus elle-même, en proie à la fièvre, à la transe, à l'alcool, à quelque drogue peut-être, qui tient un discours métaphysique à son fils en lui recommandant, si jamais, la nuit, il entend "les aboiements des chiens dans la campagne", de se cacher sous les couvertures - pour échapper peut-être à la violence de ces appels, ou pour ne pas se montrer à quelque divinité de la nuit qui accompagnerait la meute - et de ne pas les "tourner en dérision", ces chiens - l'antidote de l'humour permet cependant de tenir à distance les masques du fantastique vénéneux -, car eux aussi, comme toutes les créatures conscientes, sont des assoiffés, des "insatiables de l'infini", et qu'alors, l'enfant, la mère et les chiens sont des frères de soif, des éternels insatisfaits, des révoltés, créatures qui déambulent "pâle et longue figure" dans l'ombre où ils guettent.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 29 janvier 2013

 

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