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BLOG LITTERAIRE
13 mars 2013

CAR NOUS SOMMES A UN TOURNANT

CAR NOUS SOMMES A UN TOURNANT

1.
J'ai sucé à leur sein le sirop saturnien
Des muses. D'où ces amours muettes et ces
Mélancolies, dont je me fais l'écho quand tu
Me lis. Et car je ne veux pas finir pignouf
Picolo accoudé au bar des bras cassés,
Je m'accroche à je ne sais pas quoi d'ailleurs car,
Hélas ! les alexandrins sont des vers par trop
Fragiles qui menacent toujours de se rompre
En deux bâtons égaux qui vous tombent sur les
Arpions.

2.
L'expression "manger de la vache enragée" a pour implicite que c'est en mangeant de la vache enragée que l'on apprend à montrer les dents et à mordre, et qu'ayant appris à mordre, on finit par bouffer le vampire.

3.
"Sportsmen, méditez ce cri de Saint-Just : "Nous avons supprimé l'Aristocratie pour la remplacer par la Bureaucratie!"
(Alphonse Allais, Un emplacement digne de ce nom pour tous les sports, in "Les confessions d'un enfant du cycle")

Je ne sais pas s'il a vraiment crié cela, Saint-Just, ou s'il l'a juste murmuré, ou écrit sur une note de blanchisserie, ou pensé tout bas, que c'est mon petit doigt télépathe qui me l'a dit, mais c'est bien vrai, ça, comme disait la vache à mon grand-père. C'est d'autant plus vrai qu'il est plus facile de couper la tête à un aristocrate qu'à un bureau. Déjà, le bureau, il faut le débarrasser. Vous me direz que, maintenant, bien souvent, il suffit de débrancher l'ordinateur. De cette remarque, dont je vous remercie, je déduis donc que la prochaine révolution aura pour victime expiatoire la caste des ordinateurs. Ce sera alors la revenche de l'étrange lucarne, voire de la lanterne magique.

4.
"Nous sommes, comme dit l'autre, à un tournant de l'histoire."
(Alphonse Allais, "les troglodytes du firmament" in "Les confessions d'un enfant du cycle", Mercure de France, collection "Le Petit Mercure", 2012)

On peut regretter l'absence de majuscule au mot "histoire". L'excellent Alphonse Allais n'a pas retenu la leçon du non moins excellent Georges Perec, pour qui le mot Histoire se devait d'être écrit avec la grande hache de son historicité, évidemment. On me rétorquera que quelques années séparent Alphonse Allais (1854-1905) de Georges Pérec (1936-1982), et que le premier était déjà à tirer la barbichette des ombres quand le second n'avait pas encore louché sur les seins de sa nourrice (je ne sais d'ailleurs pas si le petit Georges a eu une  nourrice, une de ces à gros tétons qui font la force des nations et la nostalgie des mâles, je l'imagine, car j'aime bien m'imaginer, mais rien n'est prouvé, même si tout est possible). Je répondrai  que cette antérorité n'est pas une raison, puisque, et c'est Alphonse Allais qui le dit lui-même, "nous sommes à un tournant de l'histoire", et que donc, à force de tourner - car ce fameux tournant de l'histoire relève décidément du présent de vérité générale qu'affectionnent tant nos politiques - à force de tourner, on finit par faire des cercles, et même par tourner en rond, et même par revenir sur nos pas. J'en conclus donc, en bonne logique, qu'à un moment donné, le petit Georges est devenu bien grand (d'ailleurs, il était barbu) et a dû énoncer cette règle orthographique de la grande hache de l'Histoire alors que le grand Alphonse en était revenu à sa première bicyclette. D'où mon reproche justifié. Je n'en tire d'ailleurs aucune gloire. Mais, il est certain, vous ne me contredirez pas sur ce point, qu'enfin, il faut que les choses soient dites.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 13 mars 2013

 

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