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BLOG LITTERAIRE
8 août 2013

MELANGES A MADEMOISELLE M

MELANGES A MADEMOISELLE M

1.
L'étonnante, et que je ne connais point Mademoiselle M, m'a récemment communiqué ces lignes que je vous livre, car j'en aime la rythmique allitérante.

"son geôlier épris d'ivraie et d'orge
aime en songe et jamais ne dit vrai
mensonger le souffle sur sa gorge
qui longe l'ivresse de ses plaies

et ronge l'ivraie, lange une ronce
ce lâche l'ensonge, l'a dénudé
vibrer de bonheur pour une once
de mensonge, c'est toujours vibrer"

(Mademoiselle M)

Note : Certes, cette poésie fait sens. On peut y deviner un constat relativement amer : la relation amoureuse est basée sur une illusion, et celui, celle que nous aimons est essentiellement une représentation. Mais ce qui importe, c'est le jeu des syllabes, la jonglerie des sonorités ("géôlier" / "orge" / "songe" ; "ivraie" / "ne dit vrai" / "ivresse"). C'est cette musique que je trouve intéressante, qui passe presque le sens - d'autant que la relation amoureuse et ses péripéties qui vont du grotesque au tragique sera, je vous le prédis, l'un des thèmes de la rentrée littéraire 2013, comme elle le fut en 1999, en 1983, en 1978, en 1967, et bien souvent aussi avant, car, évidemment, l'amour, eh bien, l'amour, quel merveilleux souci ! Et, gageant que qui ne se soucie trépasse - du reste, qui se soucie trop trépasse aussi - à mon avis, c'est pas prêt de s'arrêter. De plus, Mademoiselle M pratique l'art du bref. Elle a bien raison. Il faut vraiment être naïf pour croire que les gens qui achètent nos livres les lisent. Ou alors, c'est qu'ils ont du temps à perdre.

2.
Sous le titre "Histoire d'une Juliette", un autre texte de Mademoiselle M.

"dans l'angle coupé au montage
Montague coupera la langue à cette trainée

elle tire
trainée de souffre en souffrances
elle tire la langue en silence
et s'élance

étire la langue en mots alanguis
"ch'expire" souffle-t-elle à bout

expiation en mots étirés
saboter le tournage
pour se tirer"

(Mademoiselle M, Histoire d'une Juliette)

Note : Très bon, et un peu énigmatique. Mais je me soucie peu du sens en poésie ; il faut surtout que ça swingue... Surtout que les poètes disent à peu près n'importe quoi, et écrivent rarement comme ils vivent (sinon ils seraient bien fous, allez!). J'aime bien le chiasme "coupera la langue à cette traînée" / "Trainée de souffre en souffrances elle tire la langue en silence".

Allez, je contreverse :

"Ch'expire" souffle-t-elle à bout"
(Mademoiselle M, Histoire d'une Juliette)

Ch'expire car chuis toute déchantée
Souffle-t-elle en poussant ses soupirs
T'en as tant que ça de soupirs poussés
Elle répond ah oui alors et qu'ils repoussent
A foison qu'c'est comme un lierre d'un
Bout à l'autre du mur.

3.
"Vers l'aine

Les sangles oblongues des violences d'hommes
Blessent mon cœur d'une blancheur aphone"

(Mademoiselle M)

Les poilus zont de drôles de moeurs zont des
Sangles des fouets des cuirs des latex
Oblongues leurs cervelles que
Des bêtes grondantes y poussent leurs phallus Les
Violences c'est quand même un paquet de monde
D'hommes de femmes d'enfants torturés ils
Blessent la vue on veut plus les voir
Mon oeil ne tolère plus que d'la comédie mon
Coeur ne bat que pour les romances
D'une bonne poilade voilà ce dont j'ai envie la
Blancheur de la neige ou de la nappe d'été et
Aphone le reste s'il vous plaît bouclez-la.   

4.
Sous le titre "Simagrées", cet autre envoi, qui me fait douter de l'identité de ma correspondante : cf "On me croit soucieux / Je ne suis que sioux". Ce soucieux-là me soucie, voyez-vous... Serais-je manipulé ? Ou cette Mademoiselle M-là se mire-t-elle aisément en mâle ? Mais peut-être que honni soit qui mâle la pense.

"A l'employeur
ma tête de fossoyeur
ne sait jamais si m'agrée.

Dedans cogne
"Si m'agrée ?
Si m'agrée?"
Dehors trogne.

On me croit soucieux,
je ne suis que sioux
Eux, eux, ont l'angoisse simiesque

Des simagrées si s'agréent,
si sacrés. Moi sauvage ?

Dans ces cas là on dit sauvetage."

(Mademoiselle M, Simagrées)

Note : J'aime beaucoup "Dedans cogne / Si m'agrée ? / Si m'agrée / Dehors trogne." Allez zou, je contreverse :

Dedans mon porte-dents ça
Cogne j'ai le spectre muppet batteur
Si m'agrée c'est quoi ces simagrées si
M'agrée que j'me grommelle
Si m'agrée magret d'canard oui si
M'agrée le soleil est tout aigrelet
Dehors je m'en vas
Trogne à renfrogne en fumer une de simagrée.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 8 août 2013

 

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