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BLOG LITTERAIRE
1 septembre 2013

GRATIN ALL'SOLE

GRATIN ALL'SOLE
Notes sur le "Soneto a Napoli" de Tristan Corbière (cf "Les Amours jaunes", Le Livre de Poche n°16083, p.154, je précise pour les notes érudites de Christian Angelet qui m'ont permis de rêvasser sur des bases sérieuses, non mais tout de même).

1.
                         "Soneto a Napoli

                         ALL'SOLE, ALL'LUNA
ALL'SABATO, ALL'CANONICO E TUTTI QUANTI
                         - CON PULCINELLA -"
(Soneto a Napoli, titre)

De quoi ça a l'air, je vous demande un peu ?

Hein, je vous demande un peu, de quoi ça a l'air, ce titre en italien, que j'ai bien l'impression que c'est pas du vrai, que ça sonne comme du vrai, mais que macache ! c'est tout du fake, de l'artefake. En tout cas, c'est un sonnet qui s'annonce, net qui s'annonce, net qui s'annonce ! (j'ai de l'offenbach clamant caboche ce matin) (1) Et même du sonnet multidirectionnel, si j'en crois la dédicace macaronique - c'est-à-dire en italien bricolo, n'allez pas y voir de la xénophobie - qui signifie, d'après ce que je lis dans la note de Christian Angelet en bas de la page 154 : "au soleil, à la lune, au samedi, au chanoine (2) et tutti quanti, avec Polichinelle." Et c'est bien comme ça que je l'entends. Autant dédier ses fantaisies aux vraies muses plutôt qu'à des gens qui pourraient en profiter pour vous demander quelque chose. (3)

Notes :
(1) "Tant pis pour toi, il faut dormir", qu'elle me répond la fille d'la chanson Chacun fait c'qui lui plait. Vous vous souvenez de ce truc chanté/parlé, une sorte de rap assez bien fait, amusant, du début des années 80, par le groupe Chagrin d'Amour. Marrant comme ça vous traîne longtemps en tête, certaines phrases...
(2) : "canonico / chanoine" : ça se tient, que ça vient du latin chrétien canonicus, qu'en français, le [k] initial s'est chuinté dans le  XIIème siècle, et que le [k] final a lâché l'affaire bien avant ou me trompje. Le Dictionnaire historique de la langue française (celui d'Alain Rey aux éditions Robert) donne canonie en 1080, chanuine vers 1121, puis chanoine vers 1165.
(3) C'est ça l'astuce, dédier à des objets (sa tasse, son lit, sa bibliothèque, son étang à canards), à des animaux (son toutou, ses ronrons, ses coincoins dans l'étang) ou à des morts (Le Grand Machin, l'Immortel Bidule, la Magnifique Chose), mais pas à des vivants, malheureux ! ça les attire. (4)

(4) ça n'a rien à voir, mais quelqu'un m'a affirmé que l'on pouvait recycler de l'huile pour faire pousser des arbres (!). J'imagine les arbres fritiers, dis qu'ça va donner, et les pancartes :
- Interdiction absolue de manger des frites devant les arbres (ça les énerve)
- Attention arbres bouillants.
A mon avis, c'est pas en recyclant de l'huile qu'on fait pousser des oliviers. (5)
(5) Ceci dit, peut-être je me goure. Le réel est si baroque.

2.
"Il n'est pas de Samedi,
Qui n'ait soleil à midi ;
Femme ou fille soleillant,
Qui n'ait midi sans amant !..."
(Soneto a Napoli, premier quatrain)

Et ça, de quoi ça a l'air ?

L'air d'un air de chanson. Le présent de vérité générale prend souvent cet air-là. Ici, il commence par traduire un dicton italien: Non c'è sabato senza sole, non c'è donna senz'a amore.Dicton qu'il reformule et brouille ensuite, avec ce drôle de participe qu'est "soleillant". Je suppose que ça peut signifier "qui rayonne". Et il est vrai que l'on n'aime jamais que ce qui est aimable.

3.
"Lune, Bouc, Curé cafard
Qui n'ait tricorne cornard !
- Corne au front et corne au seuil
Préserve du mauvais oeil. -"
(Soneto a Napoli, second quatrain)

A quoi servent les majuscules du premier vers de ce second quatrain ?

Les voilà caractères, pantomimés, ombres chinées d'encre, la "Lune", le "Bouc", le "Curé cafard", et coiffés donc ! d'un drôle de galurin qui leur sert bien à se préserver du mauvais oeil, tout cocus, les coquins, cornards qu'ils semblent être.

4.
"... L'Ombilic du jour filant
Son macaroni brûlant,
Avec la tarentela :

Lucia, Maz' Aniello,
Santa-Pia, Diavolo,
- CON PULCINELLA. -

        (Mergelina-Venerdi, aprile 15.)
(Soneto a Napoli, les tercets)

Et ça encore, de quoi ça a l'air ?

On dirait qu'elle joue de la guitare, de l'endiablée mandoline, la strophe... Le sens importe moins qu'ici le son, car je me demande ce qu'il veut dire par cet "Ombilic du jour filant son macaroni brûlant". Par contre, la rythmique est évidente :
"L'Ombilic du jour / filant
Son macaroni / brûlant".
Remarquez que je cherche pas à le gloser, l'Ombilic du jour qui file son macaroni brûlant, que moi ça me fait penser à des pâtes au gratin, et puis c'est tout, que par contre il reprend les "i" et les "an" du premier quatrain, puis qu'ensuite il y fait entrer le "a" dans sa danse, qu'il la nomme même, cette danse, "tarentela", la danse qu'on dit qu'on danse quand on est piqué par la tarentule, ou qu'on danse pour pas être piqué par, je sais pas. Enfin, ça danse, avec du "a", puis du "o", et du "i-a" même, et des noms tirés d'opéras, qui est leur grande spécialité, aux musiciens italiens, tout ça, con Pulcinella, tout ça bien polichinelle, tout fantoche, filé fromage du gratin dont je vous causa tantôt.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 1er septembre 2013.

 

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