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BLOG LITTERAIRE
4 décembre 2013

MIETTES D'OGRE

MIETTES D'OGRE

1.
Les autres, des fois, je n'aimerais pas être dans leur assiette.

2.
- Non, je vous assure, je n'ai pas d'autre ami imaginaire que moi-même.

3.
Quand on met les pieds dans le plat, il ne faut pas s'étonner que l'on vous crache dans la soupe.

4.
Une maladie rare ? - Soi-même.

5.
Ne me tutoyez pas, je pourrais être votre fantôme.

6.
Verre, ô verre, que de fantômes ai-je bus dans ce verre-là !

7.
Je persiste dans l'hier comme un amoureux qui ne veut pas quitter la gare.

8.
"mais la lutte passée, lorsqu'elle s'est une fois élevée à la hauteur de son fantôme, elle se possède"
(Diderot, Paradoxe sur le comédien, folioplus classiques n°180, p.13)

Ce n'est donc point le fantôme qui nous posséde, mais nous qui lui jouons ce tour de l'interpréter, de le rendre vivant.

9.
Qu'un comédien soit possédé par son rôle ? Voulez-vous dire que le Diable est au théâtre ?

10.
"et c'est parce qu'elle est constamment restée elle, que le public l'a constamment dédaignée."
(Diderot, Paradoxe sur le comédien, folioplus classiques n°180, p.67)

Nous ne pouvons être appréciés que lorsque nous collons à notre rôle, de telle sorte que ce que nous sommes n'est pas là où les autres sont.

11.
Renoncer à chasser le naturel est un signe de malaise dans la civilisation autant que le sont rigidité et autoritarisme.

12.
Diderot, Paradoxe sur le comédien. "d'abandonner à l'art tous les autres instants..." C'est en cela que bien des artistes se montrèrent égoïstes, égocentriques, arrogants; ce que nous n'aimons pas rappeler, tant la croyance en la bienveillance des gens de talent nous console de notre médiocrité et de la bêtise ordinaire.

13.
Il n'existe pas de civilisation sans son malaise. L'humain n'aime pas rester seul, mais il passe une bonne partie de son temps à se heurter à ses semblables, à un point tel qu'il ne peut rester longtemps en compagnie sans éprouver le désir d'être seul, et, une fois seul, il ne lui faut guère beaucoup de temps avant qu'il se rapproche des autres. C'est là tout le malaise des humains qui se contraignent et se supportent bien plus qu'ils s'aiment.

14.
"LE PREMIER : Mais j'ai donc causé longtemps tout seul ?
LE SECOND : Cela se peut; aussi longtemps que j'ai rêvé tout seul."
(Diderot, Paradoxe sur le comédien, folioplus classiques n°180, p.79)

Nos rêves, les discours de ces autres que nous n'écoutons pas.

15.
Diderot, Paradoxe sur le comédien. "A présent mettez la main sur la conscience"... Je veux bien moi, mais où l'ai-je donc rangée ?

16.
"Ne m'as-tu pas dit que, quoique tu sentisses fortement, ton action serait faible, si, quelle que fût la passion ou le caractère que tu avais à rendre, tu ne savais t'élever par la pensée à la hauteur d'un fantôme homérique auquel tu cherchais à t'identifier ?"
(Diderot, Paradoxe sur le comédien, folioplus classiques n°180, p.50)

C'est bien pour cela que nous préférons garder nos fantômes dans le secret de nos caboches, et agissons tout autrement qu'ils le feraient, s'il leur était possible d'agir en notre nom.

17.
L'Histoire nous fournit ces fantômes que nous nourrissons de nos fantasmes.

18.
Les aphorismes ? - Les miettes de l'ogre roman, des rescapés de la pieuvre des philosophies.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 4 décembre 2013

 

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