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BLOG LITTERAIRE
6 mars 2015

RAG-TIME DE LA RIVIERE DE CASSIS I

RAG-TIME DE LA RIVIERE DE CASSIS I

« La Rivière de Cassis roule ignorée
            En des vaux étranges :
La voix de cent corbeaux l'accompagne, vraie
            Et bonne voix d'anges :
Avec les grands mouvements des sapinaies
            Quand plusieurs vents plongent.

Tout roule avec des mystères révoltants
            De campagnes d'anciens temps »
(Rimbaud, « La Rivière de Cassis », v. 1 à 8)

1.
« 
La Rivière de Cassis » de Rimbaud, ce qui « roule », gosier, rouge, noir, sang séché, coagulation de soleil.

2.
Et si c'était,
d'entre les vivants et les morts, la russe « Smorodina reka »(littéralement « rivière de cassis »)? D' où les corbeaux.

3.
Rouler : c'est plein de « r », « Rivière », « roule ignorée » ; l'inconnu aussi roule sa bosse dans le réel; et l'irréel donc, il la roule aussi, sa bosse, sa bosse occulte.

4.
« vaux étranges »: l'irréel se multiplie, pond du pluriel, dadas étranges
sur lesquels nous parcourons des paysages desséchés.

5.
« vaux étranges » :
Rosses singulières à travers des paysages lunaires, des vals de mort, des mormals, de l'attrape-spectre.

6.
« 
vaux étranges » : carrousel du cassis, gosier, manège, carnaval sans masques.

7.
Voix : gorge, songe, le narrateur rimbaldien entend-il des voix ? Suscite-t-il des voix ? Se perd-il dan
s la voix ? Cherche-t-il d'autres sons, d'autres gorges, et peaux, d'autres langues pour y entendre d'autres voix ?

8.
« 
cent corbeaux » : précision façon conte de fée, c'est une armée, une grande compagnie, d'la centurie du perspicace, du vivace, indifférence du vif, seuls anges qui vaillent.

9.
« 
étranges » : « anges », « plongent », cela assone et donne le mouvement, le rythme, la corbine chorégraphie.

10.
Voix :
Elles annoncent les vents, toujours ; « plusieurs vents », façon de traiter avec l'espace, de composer avec la sorcellerie des syllabes, des « sapinaies ».

11.
« sapinaies » dit-il oui je suppose oui avec Verlaine lacanisme insolence de la raison qui fait sa raisonneuse.

12.
Littérature : rien qu'un infini jeu de mots, une bibliothèque de calembours ontologiques, de coq-à-l'âne métaphysiques.

13.
Une œuvre littéraire, si géniale soit-elle, n'est jamais qu'un point de vue synchronique sur la diachronie infinie du langage.

14.
« 
mouvements » : le mot même, « homme à semelle de vent », homme qui s'use au sable, au temps, au vent, au soleil, à la mauvaise foi.

15.
Mouvements : général d'une dévotion se jetant dans la bataille pour s'y épuiser s'y dissoudre puisque décidément tout est si amèrement buté.

16.
« Tout roule » : Ouh ! Ouh ! Tout roule fait le hibou.

17.
« Tout roule » mais rien ne bouge Ça roule ça roule escalator prends ton temps avant que le temps te prenne te fourre dans sa centrifugeuse.

18.
Tout roule, tout roule dans le remue-méninges dont tu n'es qu'une idée une connection de quelques neurones.

19.
« roule » : répétition.
On est chez Rimbaud, sur les bords de la « Rivière de Cassis »
v.1 : « La Rivière de Cassis roule ignorée »
v.7 : « Tout roule avec des mystères révoltants »
On est dans l'roulis alors, - la roulure si ça se trouve – n'est-ce point sexuel, ces « mystères révoltants / De campagnes d'anciens temps. »

20.
Dentale : Aux deux bouts des onze syllabes
de ce vers de Rimbaud :
« Tout roule avec des mystères révoltants ».
Echo, percussion.

21.
Percussion, campagne, échos, champ frappé de Blanche, été scandé, stupeur.

22.
« mystères révoltants » : révoltes dans le temps, tréteaux du passé, Christ en Flandre, « Ardennes ardentes » (qu'est devenu Georges et sa chanson?)

23.
« mystères révoltants » : et puis toutes ces rimes en -an : « révoltants » ; « temps » ; « importants » ; entend » ; « errants » ; « vent » ; d'la dentale, d'la dentale et du temps.

24.
Je plongerai mes dentales dans tes dentelles rêvai-je comme si j'avais encore des dents.

25.
Entendu dire que le mot « ragtime » signifiait « temps déchiré ».

26.
Il y a dans les pianos tant de temps déchiré, qu'on y croirait des spectres remplis de vertiges et de virtuoses apparitions.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 6 mars 2015.

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