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BLOG LITTERAIRE
31 mai 2015

LE VENT FAISAIT CE BRUIT

LE VENT FAISAIT CE BRUIT

1.
« Je les entends, fuyons. Le vent faisait ce bruit. »
(Corneille, « L'illusion comique », III, 7, v.863 [Matamore])

2.
« De même aussi, quoiqu'il y ait des espaces dans lesquels je ne trouve rien qui excite et meuve mes sens, je ne dois pas conclure pour cela que ces espaces ne contiennent en eux aucun corps »
(Descartes, « Méditations métaphysiques », méditation sixième, GF 328, p.197)

3.
Nous n'y voyons rien car nous ne sommes pas outillés pour y voir quelque chose ; du coup, nous broutons savamment.

4.
« L'idée à laquelle la philosophie doit aboutir, c'est que le monde réel est tel qu'il doit être »
(Hegel, « La Raison dans l'histoire » traduit par Papaioannou)

« le monde réel est tel qu'il doit être », c'est à dire jamais tel qu'il le devrait.

5.
« que les progrès de cette perfectibilité, désormais indépendante de toute puissance qui voudrait les arrêter, n'ont d'autre terme que la durée du globe où la nature nous a jetés. »
(Condorcet, « Esquisse d'un tableau historique du progrès de l'esprit humain »)

Et il est donc que nous ne sommes pas sortis de l'auberge…

6.
Un futur dont nous saurions déjà tout, c'est une espèce de passé, non ?

7.
Réforme des collèges 2016 : L'éducation nationale y perd son latin ; il faudrait être grec pour y comprendre quelque chose.

8.
« une matière anonyme qui se trouve chez tous les hommes et dans toutes les sociétés »
(Nathalie Sarraute, « L'ère du soupçon »)

« anonyme » est le mot.

9.
« l'homo absurdus, habitant sans vie d'un siècle dont le prophète est Kafka »
(Roger Grenier cité par Nathalie Sarraute in « L'ère du soupçon »)

10.
Une bibliothèque est un cimetière plein d'âmes qui ne sont jamais que des ombres dansantes dans les têtes des lecteurs.

11.
Les personnages des romans sont par définition des étants inexistants ; ils disparaîtront avec la langue qui les agite.

12.
« Déjà la cognée se trouve à la racine des arbres »
(Evangile selon Saint Luc, 3, « Le temps du désert »)

13.
Sans latin, ni grec, ni hébreu, ce sont les racines judéo-chrétiennes de toute notre littérature que nous coupons.

14.
« La vue a perçu, disons-nous, la grandeur et la petitesse non point séparées, mais confondues ensemble, n'est-ce pas ? »
(Platon, « La République », VII, traduit par Robert Baccou, GF n°90, p.283)

« La grandeur et la petitesse confondues ensemble » [Platon] : Voilà l'homme, et tous ses infinis.

15.
« ce pré fait de la répétition d'une seule plante toujours plus haute »
(André Breton, « L'amour fou », folio n°723, p.119)

16.
Je vois la littérature comme un merveilleux vitrail dont les éclats s'éparpillent dans l'infini des pages.

17.
« Et les trottoirs bifurquaient inexplicablement tour à tour, selon un itinéraire aussi capricieux que possible. »
(André Breton, « L'amour fou », folio n°723, p.65)

18.
Dira-t-on de nous que nous étions de ces êtres où « le vent faisait ce bruit » ?

19.
Relevée sur le net à propos d'un certain pédagogisme de la sociabilité un petit peu forcée, cette excellente expression : « la pédagogie Nutella », avec son huile de palme académique, évidemment.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 31 mai 2015

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