SPHINX COSMOS FAITES UN TITRE AVEC ÇA
SPHINX COSMOS FAITES UN TITRE AVEC ÇA
1.
« Elle est toute petite ; une duègne la garde.
Elle tient à la main une rose et regarde.
Quoi ? que regarde-t-elle ? Elle ne sait pas. L’eau »
(Victor Hugo, « La rose de l’infante »)
On ne sait pas ce qu’on regarde, mais on voit tout de même, on voit ce que l’on n’aperçoit pas, et qui va tisser sa toile dans votre tête.
Ça a l’air psychanalytique, qu'en fait moi la psychanalyse, j’y crois qu’à moitié de pas plus d’alien dans le placard (j’mangerais bien du quat’-quart).
Quand Hugo écrit qu'elle est « toute petite », il évoque une môme que c'est tout simple et bien vu : i nous tartine pas.
2.
Des fois, y a des gens i m’argardent avec un mépris souverain, ça doit être à cause de mes pustules, d’mes dents pourrites et d’mes grelots.
3.
« Sa prière faisait le bruit sourd d’une foudre ;
De grands éclairs sortaient de ses songes profonds. »
(Victor Hugo, « La rose de l’infante »)
Ouh-ouh Onh-onh Entendez-vous le cri du hibou et comme grondent ces deux vers de Hugo ?
Y a des fois dans des films ou quoi y en a des qui déambulent dans des pièces sombres qu'on dirait qu'en eux sourdent des foudres.
Y a idem les fenêtres à losanges lumineux façon Aloysius Bertrand et du sombre songeant savant dans ses bouquins et de grands éclairs dedans.
4.
« Il ressemblait au sphinx qui digère et se tait »
(Victor Hugo, « La rose de l’infante »)
Ah ça, le sphinx, il en croque toujours, faut dire qu’il doit avoir de ces énigmes aussi qu’on connaît pas, et pour cause…
« Il ressemblait au sphinx qui digère et se tait » ;
Il ronflait quelquefois, parfois même il rotait.
5.
D’où me vient ma bonne humeur ?
« Jésus, fais que ma joie demeure ! »
C’est que j’ai du pain et du beurre
Au lieu de l’oignon frotté du malheur.
6.
« Et la reine est muette, et les nuages font
Sur son royal silence un bruit sombre et profond. »
(Victor Hugo, « Zim-Zizimi » [le premier sphinx])
Le tableau, dis ! Sur fond de vaste ciel nuageux pis « sombre » et « profond » à y pressentir trombones et tintouin à timbales
Une « reine muette » que j’imagine assez droite debout en robe mauve avec de l’or en bijoux partout sur ce fond d'trouble à nuages là.
Le mot « reine » me fait penser à la « Reine verte » que j'entends dans ma tête chanter bizarre et électro-acoustiquer des scènes au loin.
Défois y en a zont l’air « sombre » et « profond » genre les ciels hugoliens qu’on dirait qu’ils vont s’mettre à cracher clairons et timbales.
7.
« Le preux ouvre son casque, et hors de la visière
Sa longue barbe blanche et tranquille apparaît. »
(Victor Hugo, « La Massue » in « Eviradnus »)
Y en a des preux zont la barbe blanche et tranquille, mais y en a d’aut’s, à c’qu’on raconte, zont le crin roux et furieux hérisson.
Ça me fait penser à Don Quichotte, ce preux-là à « longue barbe blanche » sauf qu'il était plutôt agité l'aut' barbichu au moulin là.
8.
« On l’entendra courir dans l’ombre avec le bruit
De l’aurore enfonçant les portes de la nuit ! »
(Victor Hugo, « Le Satyre »)
Défois qon entan « courir dans l’ombre » Bah quelque rongeuse de nuit, rendormons-nous… l’aurore est encor en chemin avec ses blancs moutons.
L’aurore, j’la vois bien bergère à blancs bêlants se pointer chaque matin avec son troupeau pis costaude enfoncer les « portes de la nuit ».
Quan on enfonce « les portes de la nuit » à mon avis ça doit pas fere baucoup de brui sauf si la nui est la métonymie donçékoi d'darkesque.
9.
« Alors les sphinx, avec la voix qui sort des choses,
Parlèrent : tels ces bruits qu’on entend en dormant. »
(Victor Hugo, « Zim-Zizimi »)
J'aime bien ce titre : « Zim-Zizimi » qu'ça sonne cymbales. Après y a des sphinx et des songes et touci-touça qui cause étrange.
Défois moi aussi si j’ai mangé trop d’cassoulet, j’ai comme des voix de sphinx qui sortent des choses, même que j’pige nib, sont énigmatiques.
Zavez remarqué que lorsqu’on semi-dort, les sons sont comme amplifiés qu’un zigue cogne à la porte d’une pièce radiophonique, qu'ça vous sonne dans les esgourdes genre quelque géant vient vous chercher dans vot’ canapé pour vous traîner devant le juge des enfers en personne.
Quand on a des sphinx, c’est bien embêtant : vous voilà tout énigmatique, le syndrome Holmes vous guette ; déjà, vous déduisez.
10.
« La vague sonne ainsi qu’une cloche d’alarme.
La morte écoute l’ombre avec stupidité. »
(Victor Hugo, « Les pauvres gens »)
« La morte écoute l’ombre avec stupidité » : franchement, il n’y a guère que dans Victor Hugo qu’on trouve des vers aussi épatants.
Défois les vagues s’mettent à soner, céksé l’heure du repas des Sirènes ! Ah fau les voir avec leurs yeux doux & leurs grandes dents !
11.
« Et l’on croit voir, parmi le chaos plein d’éclairs,
De détonations, d’ombre et de jets de soufre,
Le sombre emportement d’un monde dans un gouffre. »
(Victor Hugo, « Plein ciel »)
Hugo avait d’autres yeux. N’avait pas les yeux de nous aut’s citrouilles et dans la nuit qu’on dort il devinait le fourmillement des mondes.
Qu’on est tout visionnaire gonflé d' « l’on croit voir » la chamboule à éclairs, le chaos filant dans l’tout détonnant d’ombres
Qu’on argarde métaphychose, le noir tout déjeté de soufre, pis des mondes aspirés par les gouffres (qu'ça fait des grands wlouifs lointains)
Que les gouffres là dans le tout noir plein d’trous, aspirent tout d’leurs grosses lippes de gouffres pis après si ça s’trouve ils rotent
Genre marins d’une chanson de Brel qui se goulent de frites de bière de moules pis qui rotent passque Brel le dit qu’ça doit être et que si c’est pas sûr c’est quand même peut-être.
Là-bas tout au fond de l’univers que ça vous fait des épanchements gazeux, des nappes qui se baladent entre les infinis
Moi je me suis souvent dit c’est pas possip il doit y avoir plus d’un infini là-dedans que c’est d’l’infini infinissant d’tous les côtés
Qu’un infini c’est une tension vers l’infini et que donc forcé il doit y avoir des multitudes d’infinis dans toutes ces cosmiqueries là
Qui se parallèlisent et se parapètent et pipèdent dans tous les sens que l’infini il n’est pas plus linéaire que chaipas
Après dans « la légende des siècles », Hugo écrit que « La tête de Ratbert sur le pavé roula », qu’on voit bien qu’il rigole pas avec le tranchant de l’épée, Victor, que ça saigne dans ses poèmes que si j’avais pas ouvert « La Légende », j’l’aurions point su.
Patrice Houzeau
Hondeghem, le 19 mai 2017.