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BLOG LITTERAIRE
27 septembre 2006

TRISTESSE ET NUDITE

TRISTESSE ET NUDITE

Un pâle soleil de mars se couche sur la mer de Marmara. L'air du large est vif et froid. Les côtes, tristes et nues, s'éloignent dans la brume du soir. Est-ce fini, mon Dieu, et ne la verrai-je plus ? (Pierre Loti, Aziyadé, Folio classique, p.225).

1) En quoi le "pâle soleil de mars", le vif du vent et sa froidure, la tristesse et la nudité des côtes (1) - laissant sans doute apparaître les roches et leurs tranchants, squelettes d'un peuple d'animaux géants et évanouis - participent-ils de la mélancolie du narrateur ?

2) Dans quelle mesure un narrateur romanesque, une voix dans le récit, n'est-il pas, du fait même de l'écriture, voué à la mélancolie puisqu'écrire n'est jamais que s'intéresser aux noms des choses et non aux choses elles-mêmes ?

3) Mais si l'on considère ces noms, cette collection de signes qui tissent les textes, comme un ensemble d'objets, cette mélancolie ne disparaît-elle pas immédiatement, dans le moment même où l'écriture, - l'accomplissement du désir d'être scribe -, la suscite ?

Note : (1) Cette phrase de Pierre Loti m'évoque cette strophe du poème Semper eadem de Baudelaire :

"D'où vous vient, disiez-vous, cette tristesse étrange,
Montant comme la mer sur le roc noir et nu ?"
- Quand notre coeur a fait une fois sa vendange,
Vivre est un mal. C'est un secret de tous connu,
    (baudelaire, Semper eadem, vers 1-4).

Où l'on voit que, effectivement, "tristesse et nudité des côtes" ainsi que "roc noir et nu" ont à faire avec la mélancolie du narrateur baudelairien, du voyageur Loti, du pensif Mallarmé : "La chair est triste, hélas ! et j'ai lu tous les livres." (Brise marine : Tiens, encore la mer, comme c'est curieux !).

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 27 septembre 2006

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