YVES MARTIN LE MAGNIFIQUE
YVES MARTIN LE MAGNIFIQUE
Les poètes, ceusses-là qui utilisent les mots de façon si radicalement inutile, ceusses-là qui balancent des pierres dans les jardins si bien ordonnancés des belles âmes, ceusses-là qui patinent dans l'inexorable et qui, comme tout le monde, ont des soucis d'argent, de petits malaises passagers (mal aux dents, mal au ventre, mal au cul), des problèmes relationnels, des abus d'affects, les poètes sont parfois d'une magnifique simplicité. En témoignent ces vers de Yves Martin extraits d'un poème publié dans la revue Poésie 1 (n°108- 109, de juillet- août 1983, p. 147) :
"Je n'entre jamais dans une pièce
Sans être au préalable en télépathie
Avec un objet que j'épate,
Volte-face, pulvérise."
Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais moi, j'adore cet humour, cette nonchalance face aux choses, lesquelles ne sont pas toujours bienveillantes :
"Je n'aborde pas
Un visage avec franchise.
Qu'avant on me moleste,
On m'envoie les chiens, les gardes."
Et cet aveu aussi dans un autre texte (cf Poésie 1 n°108-109, p. 151) :
"Ne décolérez pas
Quand je m'assois dans le métro.
Qui donc a dit qu'après la mort
De ma mère, je deviendrai clochard ?
Phénoménal pour surprendre
Le choc des étoiles."
Poésie-chronique que cette poésie-là de la notation, au fil de la plume peut-être parfois, - et alors ? -, poésie qui fait se succéder aux phrases des plus prosaïques des fulgurances, des coups d'oeil sur la vision, qui relativisent autant qu'ils soulignent l'invraisemblable malaise de l'être au monde quand il prend conscience de sa fragilité.
Heureusement, il y a des compensations :
"J'ai mes mises en scène.
J'ouvre un Penthouse,
Vitriol de poils,
A l'instant même
Où la jeune fille se penche
A sa fenêtre."
Patrice Houzeau
Hondeghem, le 3 janvier 2008