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BLOG LITTERAIRE
19 avril 2012

PÂLE EN MOI LE DEPART ET TOUS SES GLISSEMENTS

PÂLE EN MOI LE DEPART ET TOUS SES GLISSEMENTS

1.
Glissement.
Le poème "glissement nocturne" évoque une violoncelliste qui joue la nuit de sombres et mélancolique mélodies qu'les voisins ont même porté plainte. Au si petit matin que nul ne s'en aperçoit, elle se glisse entre les rues et disparaît. Personne n'a jamais vu, aperçu, entrevu la violoncelliste. Même pas le réparateur qui vient chaque jour réparer - puisque c'est son métier - dans l'appartement. Inexplicablement, on ne sait comment, c'est bien étonnant, et même très épatant, il est tombé amoureux de la musicienne dont il collectionne les absences. Il répète souvent ces deux vers qu'il a pris du poème Ode de Valéry Larbaud :
"Prête-moi ton grand bruit, ta grande allure si douce,
Ton glissement nocturne à travers l'Europe illuminée".
C'est joli, mais un peu sot.

2.
Autres glissements et expressions relevées dans le poème de Jules Supervielle qui commence par ce vers : "Serai-un jour celui qui lui-même mena..." :

2.1
"tropicales plages" : quant à faire, puisqu'on voyage, autant aller tropiquer plutôt que d'se les peler sur les plages du Nord. Ceci dit, moi, ça me dit rien, les "tropicales plages". Pour y aller choper un cas d'école à faire songer les éminents, autant rester chez moi à attraper des rhumes. Moins exotique, plus rassurant.

2.2
"une tristesse à l'odeur d'ananas" : c'est sûr que ça change de la tristesse à l'odeur de chaussettes, de tabac froid, de mur rouge, de fenêtre sale, de gaz d'échappement, d'haleine chargée, de corps moite, de beurre rance, de mauvaise huile et de poisson pané.

2.3
"l'enfance aux entraves prudentes" : c'est joli et peut vouloir dire que ce qui distingue l'enfance de l'adulterie c'est que môme encore, on n'ose pas. Ceci dit, c'est approximatif comme point de vue. Y a des mômes culottés et des adultes craintifs. Il y aussi des marins d'eau douce et de vieux loups de mer. Il y a aussi des y a pas d'quoi rire et des coussins péteurs. Il y a aussi de soucieux sociologues et des pinces à linge. Il y aussi des cons tondants, des cons sentants, des cons ciencieux et des saouls pires que tout. Il y a aussi des vaches qui rient et des chauves qui peut.

2.4
"je ne puis adorer une ardeur" : on dirait qu'il a piqué ça à Racine, le Supervielle :
"Je ne puis adorer une ardeur si intense.
Que voulez-vous, pour vous je ne mets pas en transe."
(Racine, I fit ses noces en torride, III, 4)

 2.5
"J'aurais vécu là-bas le plus clair de ma vie" :
J'apprécie ces alexandrins clairs qui nous changent des "Ayant passé ailleurs les promesses de l'ombre", ou "L'aube en moi sillons faux cils et mares d'eau", ou "J'ai repris l'aube et les coiffeuses foudroyantes", ou "Pâle en moi le départ faut qu'jaille ach'ter du pain".

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 19 avril 2012

 

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