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BLOG LITTERAIRE
12 mai 2012

L'HOMME EST UN TROU POUR L'HOMME

L'HOMME EST UN TROU POUR L'HOMME

1.
"Les corbeaux immortels envoûtent les voyages
Qui m'emportent vers toi dans le temps hors du temps"
(Christian Bachelin, in Poésie 1 Vagabondages, n°6, été 1996, p.82)

"dans le temps hors du temps" : le temps qui n'est plus mesure, qui ne s'inscrit plus dans la diachronie, qui n'a plus ni chiffres ni sens, qui n'est plus aux aguets. On ne peut sans doute accèder à ce "temps hors du temps" que dans la perte de conscience. Aussi nous ne pouvons rien en dire. Pourrait-il être médité ? Est-ce que la transe et la méditation sont des chemins d'accès à ce temps là qui nous échappe nécessairement ? Là aussi, cette expérience semble relever de l'indicible. Il est que ce "temps hors du temps" est un fascinant.

2.
J'ai mis longtemps à comprendre que tout le monde n'avait pas été fasciné par Le Bateau ivre. Je comprends assez Michel Audiard selon qui quelqu'un qui n'aimait pas Rimbaud n'était qu'un con, et ne valait donc pas la peine qu'on s'adressât encore à lui. Le problème est que l'on peut très bien prospérer sans aimer Rimbaud, y compris - et c'est cela qui chagrine - dans les professions où la sensibilité artistique est importante (l'alliance "profession-sensibilité artistique" est une difficulté avec laquelle nous devons pourtant compter). C'est que Le Bateau ivre n'est guère utile quoique nécessaire. Il fait cependant la différence.

3.
Films pornos : l'homme est un trou pour l'homme (surtout si c'est une femme).

4.
Ah que j'eusse aimé, dandy dégingandé élégant à gants blancs  - même si j'en eusse pas des gants blancs vu qu'ça s'oublie facilement - ah que j'eusse aimé dévaler les bars des boulevards où j'eusse bu des Bloody Mary en compagnie d'une ou deux Marie-Claire, Marie-Chantal, Marie-c'que vous voulez...

5.
Comme je ne suis jamais parti en vacances (si quand même une fois), je méprise les touristes. Comme j'ai souvent échoué, je méprise ceux qui réussissent, et puisque je ne suis pas mort, je méprise les vivants.

6.
Si, alors que j'étais en sixième, au lieu de L'iliade, j'avais découvert un manuel d'électricité, ma vie sans aucun doute aurait été différente, et oh combien plus pratique !

7.
Être soi-même, pour les autres, c'est en fait être autre.

8.
Si vous prenez votre langue pour une vipère, vous finirez par vous faire mordre.

9.
Ne pas prendre froid au coeur (c'est rien d'avoir un peu froid au coeur, mais c'est gênant quand même, savez-vous), et si l'on y a froid, dans la palpitance, faut mettre des gants, les plus élégants des gants, et porter l'arrogance d'un masque. Au pire, on vous dira insensible. Au mieux, on vous accordera un certain style, voire, pour les plus sentimentaux, un certain caractère. Gagnant dans les deux cas.

10.
Je me demande jusqu'à quel point cela peut mal faire d'être méprisé par les personnes que l'on admire. Pour les trop sensibles, je pense, en effet, que cela peut causer des dégâts. C'est idiot. N'ont qu'à pas être si sensibles. Mais si c'est justement cette sensibilité qui force leur admiration ? La seule façon d'en sortir est de faire passer la valeur de cette sensibilité peu commune avant son affection. Il le faut, sinon, on fait pitié ; on incommode (on vous trouve, comme dit Rimbaud, "mauvais goût") ; et surtout, on fait une proie facile pour les manipulateurs, ces salauds qui vous veulent du bien.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 11 mai 2012

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