UNUS QUISQUE SIBI DEUM FINGIT
UNUS QUISQUE SIBI DEUM FINGIT
"Unus quisque sibi Deum fingit.
Le dégoût."
(Pascal, Pensées, édition Brunschicg 258)
1.
Note de bas de page: "Chacun se fabrique un Dieu".
2.
A chacun son dieu, comme à chacun son dû peut-être. Les humains, on dirait qu'ils ont besoin de leur dieu quotidien comme ils ont besoin d'un ordre du jour, d'une liste de priorités. L'individu se forge sa propre transcendance. Le réel grouille de transcendances contradictoires, singulières, spécifiques, spécialisées. Nous spécialisons nos dieux. Reste de polythéisme ? Le Dieu des politiques est-il le même que le Dieu des sans domicile fixe ?
3.
L'humain, une fabrique du divin. Une forge de foudres. Une orfévrerie de cas de conscience. Du méticuleux dans l'éthique, l'humain. Du foudroyant aussi. Du barbare païen.
4.
Projection de nos affects, de nos peurs. Justification de nos malheurs. Tête de turc métaphysique. Bouc émissaire de nos horreurs. Nous nous moquons de Dieu pour ne pas voir le réel en face. Le diable humain à l'oeuvre. Qui peut croire ce monde marqué par la grâce ?
5.
Dégoût donc des idoles qu'on bricole pour se donner du sens. Dégoût des accommodements avec le divin. Dégoût de la combine métaphysique. De l'escroquerie du céleste utilitaire. Dégoût du Dieu qu'on se met dans la poche, du Dieu vademecum. Dégoût du Dieu du poseur de bombes, du massacreur, de l'assassin, des croisades. Réussite des malins : substituer à l'angoisse liée à la rareté naturelle l'idôlatrie d'un dieu vengeur. Remplacer la lucidité de l'analyse par la foi aveugle.
6.
Intelligence de Pascal qui n'en dit pas plus. Le mot "dégoût", un crachat.
Patrice Houzeau
Hondeghem, le 25 mars 2012