Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
BLOG LITTERAIRE
30 avril 2012

RENDS-TOI COMPTE

RENDS-TOI COMPTE

1.
En manière de reproche, ma mère, parfois, me disait alors que, grand dadais, j'avais fait quelque bêtise : "Rends-toi compte, Patrice, rends-toi compte..."

2.
"Quand il eut terminé, quand les soleils épars,
Eblouis, du chaos montant de toutes parts,
Se furent tous rangés à leur place profonde,
Il sentit le besoin de se nommer au monde"
(Victor Hugo, Les Contemplations, Nomen, numen, lumen)

 a) Ces soleils épars du chaos montant de toutes parts me font penser à des bulles de champagne, et aussi, au bouillonnement qui prélude au surgissement de quelque monstre marin.
b) Dieu a sans doute une boîte à soleils où chacun a sa place profonde. Dieu les y range, les astres, selon un ordre connu de lui seul.
c) Dieu est le gestionnaire de la matière. Au fond, il n'est qu'un intendant.
d) Est-ce le besoin qui précède le langage ou le langage qui précède le besoin ? Et puis, pourquoi Dieu aurait-il un besoin? N'est-il pas parfait et donc parfaitement auto-suffisant ? Peut-être alors que Dieu est en fait ce besoin, n'est en fait que besoin, et tout d'abord besoin de donner sens à ce qui est en le nommant, c'est-à-dire en divisant ce qui est, en autant de référents qu'il y a de noms sur la liste que l'humanité ne cesse de compléter, d'enrichir, d'infiniser.

3.
"Une nuit que j'avais, devant mes yeux obscurs,
Un fantôme de ville et des spectres de murs"
(Victor Hugo, Les Contemplations, Les Malheureux)

Des "spectres de murs", évidemment c'est plus facile pour passer à travers les murailles. A du genre univers parallèle qu'ils font penser, cet urbain fantomal et ces murs tout en rien, que le plus étonnant, c'est qu'il y rencontrât, le narrateur totorien, un réel comme vous et moi, le laitier, ou un marchand de glaces, ou Valérian et Laureline, ou un chat, ou un loup-garou sortant d'une trompette, ou Alice s'étant trompé de miroir.

4.
"Le vallon où je vais tous les jours est charmant,
Serein, abandonné, seul sous le firmament,
Plein de ronces en fleurs ; c'est un sourire triste.
Il vous fait oublier que quelque chose existe,
Et, sans le bruit des champs remplis de travailleurs,
On ne saurait plus là si quelqu'un vit ailleurs."
(Victor Hugo, Les Contemplations, Pasteurs et troupeaux)

 Le là est ici ce lieu d'être singulier car critique. Nous circulons sans cesse entre lieux pleins et espaces déliés. On va ainsi de chez soi à la place du marché en passant par des voies qui font communiquer les lieux entre eux. Tout semble s'y articuler logiquement, c'est-à-dire en fonction de la logique des urbanistes. Mais la ville est hantée, mais l'espace est troué. A tout moment, dans un café désert, un bout de place excentré, le bout d'une très longue avenue qui débouche sur un parc quasi désert, il peut se trouver que vous vienne l'idée que ce qui est, est infiniment étrange, et même, à certaines heures, infiniment malin. La campagne multiplie la prégnance de cette idée, et il est en effet que certains lieux assez déserts pour y appeler l'être en proie à lui-même, vous font oublier que quelque chose existe.

5.
- Ton adversaire est mieux que toi ; il est plus aimable, plus serviable, mieux organisé, moins impulsif, plus sérieux, plus sympathique.
- Je n'en serai que plus féroce.

6.
"Rends-toi compte de Dieu. Comprendre, c'est aimer."
(Victor Hugo, Les Contemplations, Les luttes et les rêves, VIII)

Mais je me rends compte, je me rends compte de la puissance de Dieu puisqu'il est dans toutes les bouches. Pour ce qui est de comprendre, c'est aimer, il ne faut pas s'emballer : comprendre un énoncé ne veut pas dire que l'on va aimer le problème, ou alors, c'est que l'amour a plus d'un fouet dans son sac.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 30 avril 2012

Publicité
Publicité
Commentaires
BLOG LITTERAIRE
Publicité
Archives
Albums Photos
Publicité