Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
BLOG LITTERAIRE
3 février 2013

COMME AUTANT DE DRAGONS TERRASSES

COMME AUTANT DE DRAGONS TERRASSES
De quelques bribes de La nuit remue, de Henri Michaux.

1.
"labyrinthe" : le mot est employé plusieurs fois dans les écrits d'Henri Michaux. Bien sûr. Comment pourrait-il en être autrement à partir du moment où il emploie le mot gong ? Je me demande quel genre d'histoires on peut écrire dans un labyrinthe ? Des histoires tordues, des histoires qui se perdent, qui paument leurs personnages en cours de route, qui en changent donc, comme on change de cheval et de chemise, des histoires éventrées.

2.
"quand je reviens, il n'y a plus rien" : dès qu'on prend cinq minutes pour soi, ça ne loupe pas, le réel en profite pour se faire la malle.

3.
"barbrissant et ramoisant" : j'y vois une tête de vieux chevalier à barbriche (je dis bien barbriche, sinon j'aurais dit barbiche, mais le mot barbiche ne peut ici rendre compte du caractère barbrichant de la pilosité chevaleresque) et rossinante aussi, et qu'est au bord d'un étang, et qui se souvient avec mélancolie de tout ce temps passé, de tout ce temps guerrier, de tout ce temps qui va ramoisant en lui des branches qui vont de plus en plus loin.

4.
"On entendait en gong bas" : évidemment, le son gong bas donne l'idée du son gong bas, que l'on peut supposer entendre dans le fond du poème, et que le poète a voulu signifier en écrivant qu'on entendait en gong bas.

5.
"D'abord rien a changé" : ensuite ce fut the Big Bordel. C'est ce que je disais, le réel n'en fait qu'à notre tête.

6.
"il garde son air habituel" : et cependant comme il avait changé. Mais comme il était incomparable, il était difficile de se faire une idée.

7.
"je le déracine et le détourne" : je me demande ce que l'on peut déraciner et détourner, - un roman d'Annie Degroote ? un oiseau migrateur ? un potager oratoire ? un prince en exil ? un planté là à les regarder passer ?

8.
"non seulement j'étais les fourmis, mais aussi j'étais leur chemin" : du coup, ça me grattait, gratouillait, picotait, fourmillait partout. J'ai fait ce qu'il faut faire dans ces cas-là : j'ai acheté un tamanoir.

9.
"le même appel à l'être" : le même sois et tu sauras. Par ailleurs, vous appelez l'être et c'est un autre qui vient, même que parfois, c'est personne.

10.
une "défaite continue" : le narrateur comme quoi il connaîtrait une "défaite continue". Outre que l'existence est une longue construction qui finit par tourner en défaite continue, si ce n'est en la vieillesse est un naufrage, que l'on songe aussi que l'on ne peut faire sans défaire. Ainsi se font et se défont les visages, et les marionnettes, et tous les géants qui sortent made in caboche pour aller s'écraser dans le réel comme autant de dragons terrassés.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 3 février 2013

 

Publicité
Publicité
Commentaires
BLOG LITTERAIRE
Publicité
Archives
Albums Photos
Publicité